Alain est médaillé de la Défense nationale, il a participé à des opérations au Tchad et a servi deux ans en République de Djibouti, il est également diplômé d’Etat d’aide médico-psychologique auprès d’un public d’autistes. Il raconte :
« Le 1er décembre 2018, pour l’acte III, je suis venu à Paris, en compagnie d’autres Jurassiens, pour participer à ma première manifestation en tant que Gilet jaune. Place de l’Etoile, alors que m’étais mis à l’écart pour régler mon appareil photo, j’ai ressenti une immense douleur. J’avais reçu un tir de LBD dans le cou, ma carotide était apparente ! J’ai perdu connaissance quelques secondes plus tard. A l’hôpital Lariboisière, le chirurgien m’a confié que j’avais échappé à la mort à deux millimètres près. Ma plainte a été classée par l’IGPN qui a affirmé ne pas avoir trouver ma trace dans les dossiers des pompiers de Paris qui m’ont transporté, ni de vidéos en dépit de toutes les preuves fournies aux enquêteurs.
Malgré la peur, je suis revenu à Paris pour l’Acte IX. Dénoncés par un patron de McDo, nous sommes trois à avoir passé dix heures en garde à vue, dans les geôles crasseuses pour « rassemblement dans le but de commettre des violences sur les forces de l’ordre », avant d’être libéré sans suite. Depuis, mes deux camarades ont arrêté les manifestations par peur pour leur famille.
C’est à cette période que j’ai adhéré au collectif « Les mutilés pour l’exemple ». Avec plusieurs anciens militaires, nous nous sommes également donnés pour mission de témoigner contre les violences policières. Nous sommes donc allés chez le fabricant suisse de LBD, dans le canton de Berne, ainsi qu’à l’ONU à Genève. Force est de constater que nos bérets et nos médailles n’ont jamais freiné les violences des la BAC et des CRS !
Lors de l’Acte XXXIII à Paris, j’ai pris la parole devant des centaines de Gilets jaunes et j’ai arraché mes médailles pour les jeter au sol ! Si elles n’avaient aucune valeur pour ces soi-disant gardiens de la paix, elles n’en avaient donc plus pour moi !
Aujourd’hui, ma vie s’est arrêtée. Je prends des antidépresseurs et des somnifères pour échapper aux cauchemars. Je suis incapable de reprendre mon travail avec les autistes. Ma situation est devenue précaire et j’ai dû m’inscrire aux Restos du cœur. Mon amie et mes deux enfants sont révoltés parce qui m’arrive. Malgré tout, je continue les manifestations parce que je reste soldat et fidèle à mes valeurs.
Je suis atteint au plus profond de ma dignité d’avoir un jour servi la France et de voir comment cette même France m’a détruit. »