Mélanie

Samedi 20 Avril 2019, avec des amis et mon mari on décide d’aller à paris. On choisit d’aller sur la manifestation, délarée en prefecture, qui partait de Paris Bercy.
On prend un train à 7h31, ce qu’on fait d’habitude. On arrive Gare du nord à 9h. Pas de policier, sauf quelques uns à la sortie de la gare mais l’ambiance est cordiale.
On marche jusqu’à Paris Bercy. On arrive vers 10h30. Et là on retrouve une masse de gilets jaunes où ça rigole, ça chante, il y a beaucoup de musique, il y a beaucoup de chansons, c’est super festif.
Vers 12h30, c’est le top départ et on commence à marcher sur le parcours déclaré.

L’ambiance était vraiment chouette. En plus, nous qui avons manifesté tout l’hiver, on a eu que des manifs où on avait froid. Là il faisait bon, du coup il y avait vraiment une bonne ambiance, une bonne énergie, les gens étaient contents.
Et puis on savait qu’il y avait l’annonce d’Emmanuel Macron qui allait arriver. Du coup on échangeait beaucoup entre nous pour savoir « toi t’en penses quoi ? Toi t’attends quoi ? ».
Il y avait beaucoup de distribution de tract aussi avec nos revendications. C’était une manifestation où on a ressenti une vraie fraternité entre nous, c’était vraiment syma.

Mais quand on commence à marcher, déjà il y a des tensions avec la police. Personnellement j’entends un flic de la BAC (je suppose) qui insultait tout le monde de « fils de pute ».
On a continué à marcher. Chaque manif, le dispositif policier est différent. Cette semaine, on comprenait encore moins comment c’était conçu. Il y avait des motards avec des casques blancs, extremement nombreux, presque habillés en civil, on ne comprenait pas qui c’était vraiment (la police ou pas la police). C’était très tendu.

Les minutes avant d’être frappée, je ne m’en souviens pas.
D’après les images que j’ai pu revoir, je ne suis pas en première ligne, je suis dans la masse des personnes. J’ai un papier blanc dans la main. Souvent, quand on me tend un tract, j’aime bien le lire tout de suite pour en parler avec la personne qui me l’a distribué. De je pense que j’étais en train de lire le prospectus.
Quand les gens ont fait demi-tour, parce qu’il y avait sans doute eu des jets de pierre ou des trucs, moi j’ai pas senti que j’allais me faire charger. J’ai pas entendu de sommation.
Je vois bien que les gens accélère le pas, mais je ne cours pas, je n’ai rien à craindre, je ne fais rien. Je ne suis pas un danger pour la police. Du coup j’avance calmement, car je n’ai rien à me reprocher. Je lève les mains, pour montrer que je ne représente pas un danger.

Et là je ressens un coup violent dans la nuque. Ça je m’en souviens très précisément, je me souviens d’une décharge électrique dans le cou qui a traversé ma colonne vertébrale. Je vois des étoiles, et après plus rien. 

J’ai cru que c’était une grenade de désencerclement que j’avais pris. Et le dimanche à 16h, quand la vidéo est sortie, j’ai vu ce qu’il métait arrivé.
Je suis encore choquée aujourd’hui qu’un être humain ait pris sur lui de taper quelqu’un dans le dos, qui ne présente aucun danger.
Je suis travailleuse sociale, j’aide les gens, je ne suis pas là pour me mettre en danger ni pour mettre en danger les autres. Au contraire, dans ma vie de tous les jours, je les accompagnes.

Maintenant je ne dors plus bien. Quand je vois des gendarmes, j’ai peur. Je ne peux plus regarder des images de violence, je n’y arrive pas pour l’instant.
J’ai eu une entorse aux cervicales et j’ai 3 disques abimés.

Pour moi, les policiers sont des hommes et des femmes en uniforme, mais des hommes et des femmes avant tout. Je n’avais rien contre eux, tout comme je pensais qu’ils n’avaient rien contre moi, qu’ils étaient là pour assurer notre sécurité. Aujourd’hui je suis perdue.

Que le prefet et Castaner ne reconnaissent pas les violences policières, je trouve ça immonde. Qu’ils le veuillent ou non, je suis une victime de violence policière. J’ai pas cherché à me faire matraquer, j’y croyais même pas, je ne pensais pas que c’était volontaire au départ.
Ils ne peuvent pas laisser les forces de police laisser faire ça et dire qu’il n’y a pas de violences policières.

J’ai porté plainte et j’irai jusqu’au bout, pour que les consciences se réveillent. Et pour que des gens, qui sont peut etre contre les gilets jaunes, se disent « oui il y a quand meme quelque chose ». Pour que les gens voient que la majorité des gilets jaunes sont comme moi, non violents.

Je me suis engagée dans les gilets jaunes car je suis travailleuse sociale. Dans le cadre de mon métier, j’accompagne des gens qui sont allocataires du RSA. Quand Monsieur Macron a décidé de réformer les APL, j’ai une bonne partie des personnes que j’accompagne qui sont venues vers moi en me disant « Mélanie je ne sais pas comment je vais faire pour finir le mois de Janvier », « Il va falloir que j’aille aux resto du coeur, que je me débrouille ».
Je trouve pas ça normal, qu’une mère de famille seule, avec deux enfants, dont un autiste, n’ait pas un vrai salaire.
C’est pas pour moi que je suis sortie, j’estime avoir le meilleur métier du monde. J’étais gilet jaune avant même que ce mouvement arrive. Nous les travailleurs sociaux on est des gilets jaune en puissance.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *